À la rencontre de... Nathalie Delphin, présidente du SFCD
Publié le 18 février 2022.
Portraits de femmes engagées. L’ADF a choisi de mettre en avant les femmes qui s’engagent au quotidien, au sein de notre profession. Découvrons leurs parcours, leur histoire, leurs projets.
Rencontre avec la présidente du Syndicat des femmes chirurgiens-dentistes, créé en 1935 par un groupe de femmes ayant la ferme volonté de se prendre en charge. Un syndicat qui n’a cessé d’évoluer et de défendre les causes de son époque.
Pouvez-vous vous présenter et nous parler du Syndicat des femmes chirurgiens-dentistes (SFCD) ?
Je m’appelle Nathalie Delphin. J’ai entamé depuis novembre 2020 mon second mandat de présidente du SFCD. Je suis installée en libéral à côté de Bordeaux. Le Syndicat a été créé en 1935 par un groupe de femmes ayant la volonté de s’assumer dans une époque compliquée pour les femmes. C’est donc un des premiers syndicats de la profession à avoir été créé. Comme tout syndicat, nous sommes une structure qui s’occupe de la défense et de l’accompagnement des chirurgiens-dentistes. Évidemment nous sommes plus orientés sur l’activité au féminin, mais notre action concerne l’ensemble des activités de tous les praticiens.
Dans ses missions, quelle a été l’évolution de votre syndicat ?
Il y a naturellement eu des évolutions mais, quand il s’agit du droit des femmes, je crois qu’il faut toujours rester vigilantes. Nous surveillons attentivement les évolutions sociétales et technologiques, ce qui nous amène à être dans une évolution continue de nos propositions. En 1995 le SFCD a participé à l’obtention du congé maternité pour l’ensemble des femmes ayant une profession libérale. Ce droit, nous continuons donc de le faire évoluer, de le renforcer. Nous ne sommes pas encore sur quelque chose de parfait mais nous y travaillons et comme je vous l’ai dit nous restons vigilantes pour éviter toute dérive. Par exemple, la désertification médicale est utilisée par certains pour attirer des femmes chirurgiens-dentistes en octroyant le droit à une aide supplémentaire pour la maternité pour toute installation en zone sous dotée. Nous ne pouvons accepter que la maternité puisse être ainsi utilisée comme un chantage à l’installation.
Qu’est-ce qui vous a poussé à intégrer ce syndicat et à en devenir sa présidente ?
Étudiante, lors d’un congrès, un représentant professionnel nous a dit « la féminisation de la profession est un problème ». Quand vous êtes étudiante, et que quelqu’un censé vous représenter vous explique que la féminisation est un problème, cela ne passe pas ! Je me suis donc tournée vers d’autres syndicats. A cette époque le syndicat des femmes était en pleine négociation du congé maternité. Je me suis rendu compte que l’on pouvait défendre la profession sans stigmatiser celles qui l’exercent. Bien sûr en être présidente n’était pas une fin en soi. Quand j’ai commencé à exercer en tant que collaboratrice, il s’est trouvé qu’à un moment j’étais enceinte. Au moment de mon congé maternité, mon titulaire m’a remerciée. Je suis donc allée voir des cadres du SFCD car je n’acceptais pas cette situation et cette décision injuste. Nous nous sommes battues et nous avons obtenu plus de droit pour les collaboratrices qui partent en congé maternité. Quelques années plus tard on m’a proposé de former une équipe et d’être la présidente de ce syndicat.
Nous avons besoin de nous inspirer de toutes les expériences de nos consœurs et confrères pour être plus pertinentes dans nos réflexions et nos actions.
Quelle est la particularité de votre syndicat ?
Évidemment, il y a le mot femme ce qui signifie que la gouvernance de notre syndicat est exclusivement féminine. Cependant, il est important de préciser que tout le monde peut y adhérer, quel que soit son genre. Nous représentons aussi bien les libéraux, les salariés, les hospitaliers que les universitaires. Nous avons besoin de nous inspirer de toutes les expériences de nos consœurs et confrères pour être plus pertinentes dans nos réflexions et nos actions. Notre objectif est aussi de donner la parole aux praticiennes et, pour celles qui en ont envie, d’assumer le rôle de représentante de la profession. Notre particularité est aussi dans notre vision de la représentation : il est très important d’avoir une représentation professionnelle qui soit une projection de la profession.
Quelles sont vos actions ?
Notre rôle est de défendre l’exercice féminin ; mais aussi de travailler les dossiers communs à toute la profession en apportant une autre vision et en ayant une approche différente des problèmes courants et quotidiens des chirurgiens-dentistes hommes ou femmes. Ainsi, pour le SFCD, répondre aux besoins médicaux de nos patients doit pouvoir continuer à se faire dans un cadre sécure et serein, sans être dans un conflit éthique permanent.
Nous agissons évidemment sur la parentalité et la paternité. Nous avons également des actions sur l’ensemble des personnes qui travaillent au sein d’une structure dentaire. L’écoresponsabilité est aussi un sujet au cœur de nos préoccupations.
Nous sommes encore très impliquées contre les violences faites aux femmes en mettant en avant le rôle que le chirurgien-dentiste doit avoir dans le repérage et l’accompagnement de ces victimes.
Nous faisons enfin de la formation continue au travers de FFCD, notre organisme de formation que nous avons créé en 2007 et qui vient d’obtenir son agrément Qualiopi, gage de qualité.
Comment envisagez-vous le futur pour vous et votre association ?
J’espère que notre syndicat va continuer à grandir et agir. Nous souhaitons être présentes dans l’ensemble des institutions dans lesquelles nous sommes déjà mais de façon un peu trop cachée. Nous avons énormément de dossiers en cours. Nous allons continuer d’être très attentives aux évolutions de la parentalité. Le système de santé change, nous l’avons vu avec Ma santé 2022. Nous agissons pour que tout le monde puisse sereinement accueillir un enfant, travailler les jours souhaités... Nous souhaitons que les choix soient faits par l’individu sans contrainte. En ce qui me concerne j’espère terminer sereinement mon mandat. J’ai envie de promouvoir plus encore le SFCD et ses dossiers. L’un de nos objectifs est de mettre en valeur les femmes dans l’ensemble de nos institutions. Les promouvoir dans des postes à responsabilités.
La profession se féminise de plus en plus. Quels points positifs et éventuellement négatifs y voyez-vous ?
Évidemment il n’y a pas de points négatifs à la féminisation de la profession. Les femmes seront peut-être plus écoutées et pourront peut-être modifier le regard sur notre exercice. J’espère surtout qu’elles seront de plus en plus nombreuses à participer à sa représentation à tous les niveaux mais cela n’est pas gagné d’avance. Par exemple la profession d’infirmière est à 80% féminine, mais ce sont des hommes qui les représentent essentiellement. C’est également vrai pour notre profession où les femmes sont très peu présentes dans les instances décisionnaires de notre représentation professionnelle.
Membre fondateur de l’ADF, qu’est-ce que cette structure vous apporte ?
Je dirais que l’ADF nous a surtout permis d’avoir de la visibilité pour valoriser nos actions et nos combats. Je pense notamment à notre action par rapport à la perte de droit à la retraite en lien avec le congé maternité. Grâce au Congrès de l’ADF, nous avons pu médiatiser cette lutte et permettre ainsi de faire avancer les choses favorablement.